Depuis janvier 2024, l’Autorité fiscale israélienne a introduit une réforme significative qui modifie en profondeur les obligations déclaratives des propriétaires de biens résidentiels mis en location. Cette évolution réglementaire, qui s’inscrit dans un mouvement international de lutte contre l’évasion fiscale, impose désormais une transparence sans précédent dans la déclaration des revenus locatifs.
Un changement de paradigme
Jusqu’à récemment, les propriétaires de logements pouvaient déclarer leurs revenus fonciers de manière relativement sommaire, sans nécessairement fournir de détails précis sur les contrats de location, les identités des locataires, ou les montants exacts perçus mois par mois.
Ce cadre souple laissait la porte ouverte à des omissions – volontaires ou non – et contribuait à une perte de recettes fiscales estimée à plusieurs centaines de millions de shekels chaque année.
La nouvelle réglementation rompt avec cette logique. Elle impose aux propriétaires de documenter l’ensemble de leurs opérations locatives. Sont désormais exigés : les dates de signature des baux, l’identité complète des locataires, les montants versés, les dates effectives de paiement, ainsi que la transmission de chaque contrat sous format numérisé.
L’objectif est clair : accroître la traçabilité des flux locatifs et garantir une taxation équitable.
Une initiative cohérente avec les tendances globales
Israël ne fait pas figure d’exception. En Europe comme en Amérique du Nord, les autorités fiscales renforcent depuis plusieurs années leur contrôle sur les revenus immobiliers, notamment dans les zones urbaines tendues où les investissements locatifs ont explosé.
Ce durcissement réglementaire intervient également dans un contexte de pression budgétaire croissante. En sortie de pandémie, l’État hébreu cherche à élargir sa base fiscale sans augmenter directement les taux d’imposition.
Le renforcement de la conformité est ainsi perçu comme une solution “neutre” politiquement, mais potentiellement très rentable.
Trois régimes fiscaux toujours disponibles
Si les obligations de transparence augmentent, les options fiscales à la disposition des contribuables demeurent inchangées. Trois régimes coexistent :
- L’exonération partielle, applicable aux revenus inférieurs à un certain seuil (actuellement indexé chaque année), permet aux petits propriétaires de rester en dehors de l’imposition.
- Le régime forfaitaire de 10 %, prisé pour sa simplicité, s’applique sans possibilité de déductions, mais offre une prévisibilité bienvenue.
- Le régime progressif, enfin, permet de déclarer les revenus locatifs dans le cadre de l’impôt sur le revenu général, avec possibilité de déduire les charges admissibles (intérêts d’emprunt, travaux, frais de gestion…).
Ce choix stratégique, qui doit être effectué chaque année, suppose une analyse fine du profil fiscal de chaque propriétaire, et justifie souvent le recours à un professionnel.
Vers une professionnalisation de la gestion locative
Cette réforme a également un effet indirect mais puissant : elle incite les particuliers à professionnaliser la gestion de leur patrimoine immobilier. Fini les approximations : il devient essentiel de tenir des registres précis, d’archiver chaque preuve de paiement, et de s’équiper d’outils numériques adaptés (logiciels de gestion locative, tableaux de suivi automatisés, etc.).
Les propriétaires qui disposent de plusieurs biens, ou qui louent à travers des sociétés civiles immobilières (SCI), devront revoir leurs procédures internes pour rester conformes.
Cette évolution contribue à aligner le secteur locatif privé sur les standards déjà en vigueur dans l’immobilier commercial ou institutionnel.
Risques de non-conformité et contrôle fiscal accru
Le non-respect de ces nouvelles obligations n’est pas sans conséquences. En cas de manquement, des sanctions financières sont prévues, pouvant aller jusqu’à des amendes proportionnelles aux revenus non déclarés.
Par ailleurs, l’Autorité fiscale a annoncé un renforcement des croisements de données entre institutions (cadastre, banques, fournisseurs de services), facilitant l’identification des situations suspectes.
Les premiers contrôles sont attendus dès la fin de l’exercice 2025, ce qui laisse aux propriétaires un délai raisonnable pour adapter leurs pratiques.
Une réforme contraignante, mais structurante
La réforme israélienne des revenus locatifs marque une inflexion claire vers une gestion plus rigoureuse et transparente du patrimoine immobilier privé. Si elle exige des efforts d’adaptation, elle s’inscrit dans une dynamique inévitable de modernisation de la fiscalité.
À terme, cette clarification des règles pourrait même bénéficier aux propriétaires les plus vertueux, en assainissant le marché et en réduisant la concurrence déloyale de ceux qui jusqu’ici opéraient en marge du système.