Les banques israéliennes connaissent depuis une décennie une dynamique de croissance soutenue : augmentation des crédits, rentabilité élevée, digitalisation accélérée. Toutefois, cette trajectoire n’a pas été exempte de turbulences. Les crises récentes — la pandémie de Covid-19, le conflit du 7 octobre 2023 et la hausse des taux d’intérêt — ont mis à l’épreuve la solidité des institutions financières.
Une décennie de croissance soutenue
Depuis dix ans, les banques israéliennes se distinguent par leur solidité et leur expansion. Six des dix entreprises cotées les plus rentables du pays sont aujourd’hui des établissements bancaires, reflet d’un secteur devenu pilier de l’économie nationale.
La banque Leumi, première banque du pays, a vu ses revenus croître en moyenne de près de 6 % par an sur la décennie, tandis que la banque Hapoalim et la Mizrahi-Tefahot ont consolidé leurs positions dans le financement immobilier et commercial.
Cette croissance s’appuie sur un essor continu du crédit, en particulier dans les secteurs de la construction et de l’immobilier. En 2022, les prêts à ces secteurs ont progressé de près de 19 %, tandis que les prêts hypothécaires augmentaient de plus de 13 %.
Parallèlement, la digitalisation des services a permis aux banques de réduire leurs coûts opérationnels et d’accroître leur efficacité. La banque Leumi, par exemple, a baissé ses dépenses de 2 % cette même année tout en augmentant son portefeuille de prêts de près de 18 %.
Ce dynamisme est également soutenu par un cadre réglementaire rigoureux, piloté par la Banque Centrale d’Israël et son autorité de supervision bancaire, qui favorise la stabilité financière et la prudence en matière de gestion des risques.
Les banques face aux crises : du Covid-19 au 7 octobre 2023
La pandémie de Covid-19
La crise sanitaire mondiale a constitué une épreuve majeure. Cependant, les banques israéliennes ont affiché une remarquable résilience. Grâce à des ratios de fonds propres solides et à une régulation stricte, elles ont pu soutenir l’économie par le maintien du crédit et la mise en place de moratoires pour les emprunteurs.
Le redressement rapide de l’économie israélienne après les confinements a d’ailleurs favorisé une reprise rapide de leur rentabilité.
Le choc du 7 octobre 2023
Le déclenchement du conflit avec le Hamas a provoqué une chute brutale de la Bourse de Tel-Aviv, et l’indice bancaire TA-Banks5 a perdu jusqu’à 20 % en quelques jours. Pourtant, cette panique initiale n’a pas entamé la solidité structurelle du système bancaire.
Les bénéfices cumulés des quatre principales banques ont atteint environ 25 milliards de shekels en 2023, en hausse de 15 % par rapport à 2022.
Plusieurs facteurs expliquent cette résistance : la hausse des taux d’intérêt a soutenu les marges, le crédit a continué de croître, et la régulation prudente a permis d’absorber le choc économique du conflit.
La Banque Centrale d’Israël a néanmoins demandé aux établissements de constituer des provisions supplémentaires pour soutenir les ménages et entreprises affectés par la guerre.
L’évolution des actions bancaires et les indicateurs de marché
Les grandes banques israéliennes se distinguent également par la performance de leurs titres boursiers. La banque Leumi affiche par exemple un ratio cours/bénéfice d’environ 10, signe d’une valorisation modérée mais solide au regard de sa rentabilité.
Son retour sur capitaux propres atteint près de 17 %, l’un des plus élevés du secteur.
L’indice TA-Banks5, qui regroupe les principales banques, a connu des fluctuations importantes, mais conserve sur dix ans une tendance haussière, tirée par la croissance du crédit et la forte rentabilité.
Les investisseurs étrangers s’y intéressent de plus en plus, même si le marché reste concentré autour de quelques grands acteurs.
Cette valorisation témoigne de la confiance des marchés, mais aussi d’une certaine vulnérabilité : une dépendance forte à l’immobilier et à la conjoncture locale pourrait fragiliser le secteur en cas de retournement.
Les perspectives d’avenir du système bancaire israélien
L’avenir des banques israéliennes s’annonce globalement positif, même si des défis demeurent. La croissance du crédit devrait se poursuivre, soutenue par la reprise post-conflit et par un environnement de taux encore relativement élevé à moyen terme.
La transformation numérique constitue un autre moteur essentiel : les banques investissent massivement dans la digitalisation de leurs services et le développement de solutions fintech, cherchant à renforcer leur efficacité et leur attractivité auprès d’une clientèle jeune et technophile.
Cependant, certains risques pèsent sur le secteur. L’exposition à l’immobilier, qui représente une part considérable des actifs bancaires, demeure une vulnérabilité, surtout en cas de ralentissement du marché ou de nouvelle hausse des taux.
Par ailleurs, les tensions géopolitiques et la décélération de la croissance israélienne — passée de 6,5 % en 2022 à environ 2 % en 2023 — pourraient freiner la dynamique.
Enfin, la pression politique et sociale se fait plus forte : les profits records des banques suscitent des critiques, certains estimant que les déposants ne bénéficient pas équitablement des hausses de taux d’intérêt.
Les autorités pourraient donc renforcer la régulation ou encourager davantage de concurrence dans le secteur.
Vers une stabilité prudente
Le secteur bancaire israélien aborde l’avenir avec des atouts considérables : une rentabilité élevée, une base de capital solide et une capacité d’adaptation démontrée face aux crises. Toutefois, il doit désormais conjuguer prudence et innovation.
La priorité sera de diversifier les sources de revenus, de renforcer les mécanismes de gestion des risques et d’accompagner la modernisation technologique sans creuser les inégalités d’accès aux services financiers.
En définitive, les banques israéliennes demeurent un pilier économique essentiel, à la fois résilient et conscient des défis structurels à venir. Leur réussite future dépendra de leur capacité à maintenir un équilibre entre rentabilité, responsabilité sociale et stabilité financière.