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Si en juillet les places financières ont connu un peu de répit, profitant des publications de résultats et de l’interruption des réunions des grandes banques centrales, le mois d’août n’est pas de tout repos, avec des marchés qui doivent digérer une succession de petites crises diplomatiques. La géopolitique continuant d’occuper le devant de la scène.

De manière générale, le mois d’août est un mois toujours un peu plus sensible sur les bourses, propice aux montées de stress plus rapides : les volumes étant plus faibles en raison des vacances, chaque mouvement a une amplitude qui est d’autant plus décuplée… Notamment avec un Donald Trump, dont les tweets et déclarations ne connaissent pas de pause estivale.

Mais le président américain est toujours en campagne, il a un électorat à capter avant les élections de mi-mandat, le 06 novembre. Son cheval de bataille : le protectionnisme. Il doit montrer à ses électeurs qu’il tient ses promesses sur le sujet, quitte à créer, transitoirement, des agitations sur les marchés. Tensions qui sont montées, encore d’un cran, depuis que le président américain a annoncé que la nouvelle vague de produits chinois (celle de 200 milliards de dollars) serait frappée par des droits de douane, non plus de 10%, mais de 25%.

Malgré toutes ces volte-face de Trump, les marchés US font preuve d’une éminente résilience et affichent une quinzaine positive (+1% pour le Dow Jones et +0,3% pour le S&P 500).

Fait assez rare, Wall-Street s’est totalement désynchronisé de la chute des bourses chinoises, qui sont pourtant passées en ‘’bear market’’, sans que ce mouvement baissier ne migre aux US ou même en Europe. On se souvient du Krach boursier de 2015 en Chine, qui avaient entrainé toutes les places financières dans sa tourmente.

Le marché, désormais, préfère s’accrocher aux bonnes nouvelles, même minces. Ainsi, les investisseurs ont particulièrement bien accueilli la « news » selon laquelle la Chine enverrait un haut responsable aux États-Unis à la fin du mois pour reprendre les négociations commerciales, premières discussions du genre depuis de nombreuses semaines. Ce qui laisse penser qu’il pourrait y avoir une détente commerciale entre Washington et Pékin.

Parallèlement, Wall-Street continue à surfer sur la vague des très bons résultats trimestriels des entreprises. La saison a été très bonne aux Etats-Unis, avec 80% de surprises positives, le meilleur taux depuis 2009 ! Et pour ce qui est des anticipations, là encore 80% des entreprises US ont révisé leur « guidance » à la hausse. C’est un chiffre historique, la moyenne se situe habituellement autour de 60%.

De ce point de vue-là, la politique court-termiste de Trump est une vraie réussite. Sa politique d’allègements fiscaux est un soutien qui se répercute directement sur les actifs financiers. Un soutien qui peut encore durer un ou deux ans. C’est ce qui explique que les États-Unis sont en train de capter tous les flux aujourd’hui.

Parallèlement, on a une série de statistiques de bonne facture, qui montrent que les États-Unis ne sont pas encore en fin de cycle. La seule crainte pour les investisseurs serait que ces bons chiffres macro puissent accélérer le resserrement monétaire de la banque centrale américaine. Une crainte exacerbée par les droits de douane prohibitifs, récents, sur l’entrée aux États-Unis des produits chinois, qui font grimper le prix des produits de base. Des pressions inflationnistes qui risquent, d’autant plus, d’encourager la Fed à augmenter ses taux d’intérêt, pour maitriser l’inflation.

L’Europe a quant à elle nettement sous-performé les US, sur la première quinzaine d’août. L’indice parisien abandonne plus de 3% et le Dax 3,5%. L’intensification des tensions commerciales pèse sur le moral des investisseurs, les indices européens pâtissent de ce climat délétère et les velléités haussières s’en trouvent donc paralysées.

Plusieurs foyers de tensions géopolitiques subsistent, incitant à la prudence. Le risque italien était déjà venu troubler la mécanique de la zone euro, sur fond de tensions diplomatiques et commerciales.

S’est ajouté, plus récemment, le risque turc, jusque-là ignoré par les investisseurs. Un nouveau risque qui a, pourtant, fini par rattraper les places financières européennes, depuis qu’un des responsables de la BCE s’est dit inquiet de l’exposition des banques européennes à la Turquie, dont la monnaie affiche une chute vertigineuse de 40% face au dollar depuis le début de l’année. Sachant que l’Espagne, la France et l’Italie sont les plus gros prêteurs.

Une exposition, certes, de 135 milliards d’euros à la Turquie, mais qu’il faut toutefois relativiser, c’est « trop peu » pour que cela cause « une crise significative ». Un autre dirigeant de la Banque centrale européenne, a d’ailleurs tenu à minimiser ce risque, jugeant que la crise de la devise turque aurait, quoi qu’il arrive, un impact limité sur les banques, du fait de l’amélioration des systèmes financiers dans leur ensemble.

De manière plus générale, on commence à sentir quelques tensions, du côté des émergeants, qui sont particulièrement impactés par l’accélération du dollar qui dégrade leur situation budgétaire. Ces pays étant endettés en dollar, la moindre hausse de la devise américaine aggrave, de facto, leur situation financière.

La situation de ces pays peut vite basculer, si à cela vous ajoutez des erreurs politiques en interne, comme en Turquie, avec un Erdogan qui a littéralement sapé la confiance des investisseurs, en se déclarant notamment « l’ennemi des taux d’intérêt », refusant un resserrement monétaire qui, certes, jugulerait l’inflation mais qui, selon lui, freinerait la croissance économique.  Conséquences : les prévisions d’inflation flirtent désormais avec les 20% dans le pays et les investisseurs étrangers ont réagi en retirant massivement leur argent.

Dans ce contexte d’aversion au risque, les chiffres rassurants de la croissance en zone euro pour le deuxième trimestre (+2,2 % en rythme annualisé) et de la confiance des investisseurs allemands en hausse, en août, ont malgré tout apporté un peu de soutien aux marchés européens. Même si l’appétit pour le risque sur les marchés actions reste freiné par les tensions commerciales et diplomatiques entre les États-Unis et plusieurs de ses grands partenaires.

Un contexte qui favorise par ailleurs l’appréciation du dollar, les États-Unis apparaissant en position de force. Le billet vert a également été soutenu par des chiffres supérieurs aux attentes des ventes au détail et de la productivité, soutenant la perspective d’une croissance économique américaine très stable et d’une continuité dans le relèvement des taux par la Fed.

L’euro, désormais à 1,14 contre le dollar, est à la peine, et continue d’être exposé au risque de voir les banques européennes affectées par les problèmes financiers de la Turquie. Un mouvement de baisse qui s’était accéléré le mois dernier lorsque la Banque centrale européenne a repoussé les perspectives de relèvement de son taux directeur.

Dans un marché toujours hésitant, partagé entre la hausse de la production suite à l’accord de l’Opep et les sanctions américaines à l’encontre de l’Iran, le prix du pétrole marque le pas, après des mois de hausse. Il vaut ainsi 9 % de moins qu’un mois auparavant. (71$ pour le Brent et 65$ pour le WTI).

Le baril, libellé en monnaie américaine, subit également la pression d’un dollar fort. Les investisseurs utilisant d’autres devises voient leur pouvoir d’achat diminuer quand le billet vert augmente.

Par ailleurs alors qu’on a habituellement une baisse des stocks de pétrole conséquente pendant la saison estivale, saison des grands départs en vacances aux États-Unis, les cours ont été, cette fois, pénalisés par une hausse surprise de ces stocks.

Nouvelle séquence baissière pour les métaux précieux, également lestés par la persistance d’un dollar fort. L’once d’or casse ainsi à la baisse la barre des 1190 USD.

Précision : Les informations contenues dans cet article n’engagent que le rédacteur et ne sauraient se substituer à un conseil financier spécifique. Elles ne sont valables qu’à la date de leur rédaction uniquement.

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