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C’est une rentrée un peu difficile pour les marchés. Le mois de septembre est réputé pour ne pas avoir une bonne réputation. C’est en tout cas un mois qui se présente avec beaucoup d’enjeux, après un été qui s’est finalement assez bien déroulé.

Il est certain que face aux multiples remous sur la scène commerciale mondiale, les bourses sont restées hésitantes cette première quinzaine du mois. Le marché essaie de se positionner par rapport à toutes les informations qui lui parviennent, mais n’arrivent pas à se débarrasser du spectre de la guerre commerciale. D’autant plus que les véritables intentions du président américain restent floues.

A Wall Street, c’est donc la Chine qui domine l’actualité. Les déclarations de Trump sont, clairement, l’un des facteurs qui sensibilisent le marché actuellement, avec la crainte de voir le président US annoncer la mise en place de nouveaux droits de douane sur les marchandises chinoises.

Si la première semaine de septembre s’est soldée par une baisse des trois grands indices, d’environ -1,25% en moyenne pour le Dow, S&P et Nasdaq, pour la deuxième semaine, la bourse de New York enregistre cependant des gains appréciables, profitant d’une éclaircie en matière commerciale, pour regagner le terrain perdu la semaine passée, alors que Washington et Pékin s’étaient dit prêts à reprendre le dialogue pour éviter une escalade.

L’accord de libre-échange des États-Unis avec le Mexique et les échanges positifs avec le Canada avaient déjà suscité quelques espoirs et le marché espérait des avancées avec la Chine.

Mais le président américain a récemment jeté de l’huile sur le feu, en annonçant qu’il était, d’ores et déjà, prêt à surtaxer 200 milliards de dollars d’importations chinoises et pourrait potentiellement imposer des tarifs douaniers sur la totalité des produits chinois entrant aux États-Unis, si la Chine s’entêtait. Washington impose actuellement des barrières douanières de 25% sur 50 milliards de dollars de marchandises chinoises.

Le feuilleton déjà interminable de la guerre commerciale pourrait connaître un nouvel épisode : le bras de fer entre Washington et Pékin pourrait être porté devant l’OMC. La Chine estime en effet que Washington ne respecte pas les règles du commerce mondial actuel.

Une autre menace de la Chine plane. Le pays pourrait être tenté de dévaluer sa monnaie, ce qui ferait monter le dollar et ferait, de facto, pression sur les entreprises exportatrices américaines.

D’autant que Trump devrait rester sur ses positions et conserver sa ligne de conduite jusqu’aux élections de mi-mandat, début novembre. Affaibli par les poursuites judiciaires impliquant son entourage, il pourrait même entrer dans une espèce de surenchère et durcir le ton sur le plan commercial (du moins pour les apparences), toujours dans la volonté de mobiliser son électorat sur un thème qui a bien fonctionné jusqu’à présent.

Pour les marchés, cette situation risque donc de perdurer, au moins, jusqu’aux élections de novembre.

L’espoir d’une détente, à terme, pourrait venir de la pression des entreprises américaines. L’initiative d’Apple, en est le bon exemple. Apple qui a alerté le département du Commerce américain en indiquant que ses produits risquaient d’être pénalisés par les nouveaux tarifs douaniers sur les produits importés de Chine et que les conséquences pourraient être terribles pour beaucoup de sociétés américaines installées là-bas. Ce qui serait, au final, contre-productif pour les États-Unis.

Outre la thématique commerciale, Wall-Street reste heureusement soutenu, en toile de fond, par le dynamisme des secteurs de la Tech et de l’énergie, ainsi que par des statistiques économiques toujours encourageantes.

L’été a permis aux investisseurs de se rassurer sur la conjoncture économique américaine. Aux États-Unis, la confiance des consommateurs s’est nettement améliorée en septembre. La production industrielle (très surveillée par les analystes) a augmenté en août, pour le troisième mois d’affilée. Par ailleurs, la publication du rapport sur le chômage aux États-Unis en août, a été marquée par de solides créations d’emploi et une montée des salaires. Le taux de chômage est resté stable à 3,9 % et 201.000 postes ont été créés (mieux que les 191.000 estimés).

Ce témoignage de l’excellente forme de la croissance américaine a permis aux marchés de se stabiliser.

Wall-Street pourrait également bénéficier d’un nouveau catalyseur de taille, avec la perspective de nouvelles baisses d’impôts aux États-Unis : la « réforme fiscale 2.0 ». Afin de se démarquer des démocrates, à l’approche des élections de mi-mandat, les républicains envisagent de présenter des propositions concernant de nouveaux allégements fiscaux.

Les marchés européens, après une première semaine de septembre assez calamiteuse, ont également fini sur une note positive en deuxième semaine. Dans l’espoir, notamment, d’une détente en Italie, avec un budget italien qui devrait finalement rentrer dans le rang et satisfaire les critères de Bruxelles. Le gouvernement italien, contre toute attente, a annoncé qu’il respecterait « toutes les règles, toutes les contraintes et tous les engagements pris ». Les taux d’emprunt italiens se sont, aussitôt, détendus. Le taux à dix ans italien est tombé à 2,90% (il était à 3,34% fin août). Ce qui a soutenu l’ensemble des banques européennes.

Le Cac 40 continue de se comporter mieux que les autres places européennes, grâce, notamment, aux bonnes performances de ses poids lourds du luxe et du pétrole. A ce propos, les bons résultats d’Hermès et les infos autour d’une éventuelle reprise de la maison de luxe Salvatore Ferragamo, ont littéralement fait monter le secteur. Par ailleurs, la hausse du baril, autour de 80 dollars, a également boosté les titres pétroliers.

Les bourses européennes ont également profité de la meilleure tendance imprimée par les marchés émergents, dont le risque a perdu de son intensité. L’économie européenne étant considérée comme davantage liée aux économies émergentes, que l’économie américaine. La détente du secteur des émergeants a été soutenue par la récente baisse du dollar. Mais également par la Banque centrale turque, qui a défié Erdogan et affirmé son indépendance en relevant ses taux d’intérêt. En contradiction avec la volonté du président. C’est ce doute même sur l’indépendance de la Banque centrale turque qui avait été sanctionné, cet été, par les marchés. La Turquie a fortement relevé son principal taux d’intérêt pour endiguer la hausse rapide de l’inflation et stopper la chute de la livre turque, ce qui a été salué par les investisseurs.

Du côté de l’économie en zone euro, les indicateurs plaident pour une stabilisation de la croissance au troisième trimestre, autour de +2% en rythme annualisé. On notera, également, le retour de l’amélioration du moral des investisseurs allemands en septembre.

Côté entreprises européennes, les perspectives de résultats sont toujours favorables (hausse attendue de 7% sur 2018 et de 10% en 2019).

Du point de vue des banques centrales, la conférence de presse du président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, n’a pas réservé de surprise majeure. La BCE a maintenu son principal taux directeur à 0, au moins jusqu’à l’été 2019.  La BCE s’est, néanmoins, montrée un peu plus Hawkish en ralentissant ses rachats d’actifs mensuels, avant l’arrêt complet de ce programme à la fin de l’année.

Accalmie également du côté du Brexit où les discussions semblent être en bonne voie. Michel Barnier, le négociateur de l’UE pour le Brexit, a jugé fort plausible d’arriver à un accord avec le Royaume-Uni sur son départ de l’Union européenne, d’ici deux mois.

La parité euro dollar, de son côté, est remontée. L’euro a en effet repris la barre, plus ou moins, des 1,17 dollar. La devise européenne est portée, en septembre, par une détente du risque italien et des émergeants et par une BCE un peu plus ‘faucon’. Les montants mensuels des rachats d’actifs, qui s’arrêteront à la fin de l’année, seront ramenés de 30 milliards d’euros jusqu’en septembre, à 15 milliards mensuels à partir d’octobre.

Pour ce qui est des matières premières, on a assisté ces deux dernières semaines à une montée des cours du brut sur fond de sanctions contre l’Iran, ainsi que de menaces d’ouragan aux États-Unis. Le baril de Brent est monté jusqu’à 80 dollars. Il s’échangeait en fin de semaine autour des 78 dollars, après des prises de bénéfices.

L’once d’or a connu un léger rebond, ces derniers jours, regagnant le seuil des 1200 dollars qu’elle avait abandonné. Un regain qui s’explique principalement par l’accès de faiblesse du dollar, sa devise de référence. Toutefois le rendement du taux à dix ans américain se tend autour de 3%, ce qui pourrait, encore, pénaliser l’appétit des investisseurs pour la détention d’or qui, par définition, ne rapporte pas d’intérêt.

Précision : Les informations contenues dans cet article n’engagent que le rédacteur et ne sauraient se substituer à un conseil financier spécifique. Elles ne sont valables qu’à la date de leur rédaction uniquement.

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