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BOURSES et POLITIQUE
Même si la configuration reste solide et dans une tendance encore dynamique, les marchés ont été rattrapés par les doutes politiques et ont finalement terminé le mois de mai en ordre dispersé. Plusieurs sujets ont assombri le moral des investisseurs, dont le flou politique en Italie.

La crise italienne qui s’est amplifiée, à la fin du mois, a eu raison de la tendance dynamique qui s’était enclenchée sur les marchés européens, depuis fin avril. Une hausse portée, en partie, par la flambée du pétrole. Les valeurs pétrolières pesant lourd dans la cote.

Devant les craintes de nouvelles turbulences dans la zone euro les indices européens ont été pénalisés par le mouvement d’aversion au risque et ont plié.

Pour l’instant, on ne peut pas parler de retournement de tendance, l’agitation récente sur les marchés trouve surtout ses fondements dans les incertitudes politiques qui ont secoué l’Europe. Le contexte politique tendu en Italie est apparu comme une nouvelle source de volatilité dans un marché qui était déjà fébrile.

Avant de trouver un dénouement récent, l’Italie, troisième économie de la zone euro, a donné quelques sueurs froides aux investisseurs. La principale crainte des marchés étant la peur de nouvelles élections, avec le risque d’une majorité hostile à la zone euro.

Les Bourses européennes ont également dû affronter les soubresauts qui ont secoué l’Espagne, où une motion de censure a été déposée par le Parti socialiste pour renverser le gouvernement Rajoy.

Conclusion : si le Dax allemand s’en sort à peu près « flat » avec un timide +0,06%, le Cac et l’EuroStoxx accusent un repli de respectivement -2% et -3,3% sur le mois de mai.

Toutefois, malgré des doutes multiples, l’environnent reste bon. Surprise sur le front de l’inflation en Europe : le taux annuel de la zone euro a bondi en mai, à 1,9%, contre 1,2% en avril, tiré notamment par la hausse des cours du pétrole.

Un taux d’inflation qui risque d’ajouter quelques doutes sur la politique monétaire de la BCE. Le marché estime que Mario Draghi devra prendre en compte le risque italien, mais aussi le rebond de l’inflation dans la zone, même s’il est essentiellement lié à la hausse des prix énergétiques.

Alors que l’Europe avait surperformé les indices américains en avril, Wall Street a repris le leadership en mai.

Bénéficiant d’un effet dollar indéniable, les actions américaines signent leur meilleure performance mensuelle depuis janvier. Le Dow Jones enregistre un gain de 1,1%, le S&P 500 +2,2% et le Nasdaq valide un gain voisin de +5%, ce mois-ci.

La résilience du Nasdaq s’explique par les hausses des poids lourds techno. comme Facebook ou Alphabet (Google)… qui signent leur retour à la hausse. En outre, les indices US ont encore été soutenus par la bonne réception réservée aux chiffres trimestriels de plusieurs entreprises, qui n’avaient pas encore publié leurs résultats.

La performance positive de Wall Street, en mai, n’a pas empêché les indices d’être également sous pression, après les propos de Donald Trump, qui s’est dit insatisfait de la teneur des discussions engagées avec la Chine sur le plan commercial. L’annulation initiale du sommet avec le leader nord-coréen, n’avait pas non plus été bien accueilli par les places financières, ajoutant encore un peu plus d’incertitudes à la situation générale actuelle.

L’impasse italienne a également eu des répercussions sur la bourse de New-York, touchant notamment les valeurs bancaires à Wall Street. Les marchés ont tendance à être très sensibles aux évolutions liées à la sortie de l’euro.

Toutefois, les États-Unis ont pu bénéficier d’un catalyseur de taille. Fidèle à sa promesse de déréguler l’économie américaine, Trump a réussi à faire voter, par le congrès américain, une loi assouplissant les régulations bancaires (mise en place sous la présidence Obama, après la crise financière de 2008), la fameuse loi Dodd-Frank. Avec cette dérèglementation, les banques de petites et moyennes tailles ne seront plus soumises à certaines règles de contrôle imposées auparavant. Pour les grandes banques, les règles des stress-tests et les ratios capitalistiques ont également été assouplies.

D’un point de vue macroéconomique les indicateurs américains sont plutôt de bon augure, entre la stabilisation de l’inflation à +2% sur un an en avril et la nette progression des dépenses des ménages américains ce même mois.

Sur le front de l’emploi, les investisseurs ont eu un bon rapport à tout point de vue. Les Etats-Unis ont créé 223.000 emplois en mai, contre 190.000 en avril, pour un taux de chômage en retrait à 3,8% (au plus bas depuis 18 ans). Le salaire horaire accélère légèrement, de 0,3% sur un mois, contre +0,2% anticipé, et de 2,7% sur un an (+2,6% attendu).

Un environnement toujours favorable qui permettra probablement à la Fed de franchir un pas supplémentaire vers la fin de sa politique accommodante.

 

ITALIE : UN GOUVERNEMENT AUX FORCEPS
Voilà trois mois que l’Italie est sous pression et traverse une zone de turbulences. Depuis les élections législatives, début mars, le pays se cherchait un gouvernement, un véritable casse-tête, les résultats du scrutin n’ayant pas permis à une majorité claire de se dégager.

A l’issue des législatives, deux nouvelles forces politiques ont émergé, au détriment des partis traditionnels. La coalition entre la droite et l’extrême droite (37% des voix), emmenée par la Ligue, avec à sa tête Matteo Salvini. Et le mouvement 5 étoiles qui a récolté, à lui seul, 32% des votes, avec Luigi di Maio en chef de file (succédant au médiatique Beppe Grillo, fondateur du mouvement).

Ces partis ont, contre toute attente, décidé de s’unir, pour obtenir la majorité absolue et ainsi éviter que l’Italie retourne aux urnes.

Cette alliance des extrêmes n’a évidemment pas été bien perçue par les marchés financiers. A commencer par le marché italien qui a été sous pression.

Cette coalition a, en effet, de quoi inquiéter les marchés. C’est un mélange des promesses les plus extrêmes des deux partis populistes. Des promesses souvent irréalistes et surtout sans financement : suppression de la réforme des retraites, baisse massive des impôts, revenu minimum… Des mesures qui vont immanquablement gonfler la dette publique du pays. Leur coût est estimé à plus de 150 milliards d’euros, pour un pays déjà surendetté. La bonne nouvelle pour les marchés étant que leur programme commun ne prévoit finalement pas la sortie de l’euro.

La deuxième étape de la négociation était de trouver un premier ministre qui dirigerait ce gouvernement improbable. Il semblait difficile pour Salvini et Di Maio de se retirer pour laisser l’autre obtenir le poste. Ils se sont donc mis d’accord sur un troisième nom : Giuseppe Conte, un juriste complètement novice en politique qui a promis une politique anti-austérité et sécuritaire.

Le système italien prévoit que le gouvernement ainsi constitué soit présenté au président de la République. La République italienne est un régime parlementaire et le président (élu par des parlementaires) y a peu de pouvoirs. Cependant, il a le pouvoir de refuser une liste gouvernementale si elle ne lui convient pas.

C’est ce qui s’est produit. Le chef de l’État Sergio Mattarella n’a, dans un premier temps, pas validé les propositions de Giuseppe Conte en raison de la présence, au poste de ministre de l’Economie et des Finances, d’un professeur d’économie très critiqué pour ses positions eurosceptiques. Les marchés avaient salué ce veto présidentiel.

Giuseppe Conte après avoir une première fois jeté l’éponge face à l’inflexibilité du président de la République, a finalement présenté une nouvelle liste plus “eurocompatible”. Si les leaders des deux mouvements, Matteo Salvini et Luigi Di Maio prennent respectivement les postes de ministre de l’Intérieur et de l’Industrie et du Travail, c’est un « pro euro » et non un eurosceptique qui est cette fois proposé à l’Economie. Ce qui devrait rassurer, à court terme, les marchés.

Les investisseurs bien que momentanément rassurés, continueront, néanmoins, d’observer de la prudence par rapport à la situation politique italienne. C’est une nouvelle expérience gouvernementale pour l’Italie et donc un risque potentiel pour la cohésion de la zone euro.

 

ESPAGNE : MARIANO RAJOY RENVERSÉ
La zone euro ne connait pas de répit en ce moment. Après l’Italie c’est l’Espagne qui redéfinit son paysage politique.

L’Espagne, qui en quelques jours est devenu un autre foyer potentiel de risque politique. Le chef du gouvernement conservateur espagnol Mariano Rajoy, au pouvoir depuis 6 ans, a, en effet, été renversé par une motion de censure. La raison de cette motion de censure : le PP, parti de Mariano Rajoy est empêtré dans plusieurs scandales et s’est retrouvé dans un méga procès pour corruption.

Pourtant, en dépit de la récession, face à laquelle il a imposé une sévère cure d’austérité, Rajoy avait réussi jusque-là à survivre à plusieurs crises majeures : des mois de blocage politiques en 2016 jusqu’à la tentative d’indépendance de la Catalogne l’an dernier. Mais la condamnation de son parti, pour avoir bénéficié de fonds obtenus illégalement, aura été fatal pour Rajoy.

Dans cette affaire, les juges ont conclu à l’existence d’un « authentique système de corruption institutionnelle », dans laquelle pas moins de 29 membres du Parti Populaire ont été inculpés.

Dès l’annonce de la condamnation du PP, le socialiste Pedro Sanchez a saisi cette opportunité et est monté au front. Il a mis en doute la crédibilité de Mariano Rajoy dans cette affaire.

Sanchez est à l’origine de cette motion de censure qui vient d’être adoptée. Pour ce faire, il n’a pas hésité à former une majorité socialiste pour le moins hétéroclite, allant de Podemos aux indépendantistes catalans et aux nationalistes basques.

Reste à savoir si le nouveau chef du gouvernement sera en mesure de gouverner avec une majorité aussi hétéroclite. Peu de chance donc que cette nouvelle formation ait la capacité d’agir. Ses alliés de circonstance ont d’ailleurs tous souligné que leur vote contre Rajoy n’était pas un chèque en blanc. Podemos a déjà réclamé d’entrer au gouvernement.

Après la crise italienne, nous voici face à une crise espagnole. Mais on sent moins de nervosité pour la situation espagnole du côté des marchés.

Il faut dire que la situation de l’Italie et celle de l’Espagne sont très différentes. La croissance espagnole apparait plus solide. C’est une des plus fortes d’Europe : 2.7% de prévu pour 2018. Le chômage baisse, même s’il reste à un taux élevé, le budget a déjà été voté et devrait donc être respecté par le nouveau gouvernement.

Rappelons également que les principaux partis politiques espagnols sont pro-européens. Donc pas d’inquiétude réelle sur l’Espagne.

 

GUERRE COMMERCIALE, SUITE…  
Alors qu’une certaine accalmie se profilait le mois dernier, la trêve n’aura été que de courte durée. Menaces américaines, contre-menaces chinoises, contre-menaces européennes… Le feuilleton semble sans fin.

La méthode de Trump, peu orthodoxe, n’en finit pas de déstabiliser les partenaires commerciaux des États-Unis.

Trump s’était d’abord attaqué avec une certaine obsession à la Chine. Annonçant plus tard que les menaces de représailles contre Pékin étaient suspendues, après qu’un consensus ait été trouvé sur la réduction du déficit commercial américain.

Pékin a accepté pour ce faire, de donner des gages de bonne volonté, et d’augmenter considérablement ses achats de biens américains, notamment dans le secteur agricole et le secteur de l’énergie, tout en s’engageant à ouvrir davantage son marché aux marchandises américaines.

Ce “consensus” s’était également accompagné d’une suspension de leurs menaces de représailles respectives. Puis à nouveau, revirement de Trump fin mai. Dans un communiqué, la Maison Blanche a annoncé que les sanctions envisagées contre la Chine entreraient bien en vigueur. Les Etats-Unis comptent donc bien imposer des taxes de 25 % sur 50 milliards de dollars de biens chinois. La liste finale des importations concernées sera annoncée d’ici à mi-juin. Pour autant, la Maison Blanche a assuré que les discussions se poursuivaient.

La Chine n’a pour l’instant pas sur-réagi, mais a précisé qu’elle évaluera attentivement les mesures américaines ainsi que leur impact et se réserve le droit de prendre des mesures similaires.

L’union européenne n’est pas en reste. Alors qu’on misait sur la détente entre les États-Unis et l’Europe, Trump a surpris à nouveau. Il a considéré que les négociations avec l’Europe, le Mexique et le Canada ne progressaient pas assez rapidement et a mis ses menaces à exécution en les taxant de 10% et 25% sur les importations d’acier et d’aluminium. Les pays qui ont accepté de réduire leurs exportations comme le Brésil ou l’Australie ont été exemptés.

Le Mexique et le Canada ont répliqué immédiatement en annonçant également des taxes équivalentes sur les importations américaines. L’UE a promis des “contre-mesures” rapides, tout en décidant de saisir l’Organisation mondiale du Commerce.

Pour les investisseurs c’est de l’incertitude en plus qui se profile, et le marché est très sensible à cela.

Le gouvernement allemand a prévenu, quant à lui, que la réponse à “l’Amérique d’abord” sera “l’Europe unie”.

SOMMET US/CORÉE DU NORD : OUI ? NON ?
Les marchés avaient accueilli l’annonce du sommet entre les dirigeants, américain et nord-coréen, comme un signe d’apaisement, éloignant la perspective d’une escalade militaire pouvant ouvrir une période d’incertitudes. Puis volte-face de Trump, le président des Etats-Unis avait finalement annoncé, fin mai, l’annulation du sommet avec son homologue nord-coréen. Mais une semaine après son désistement, le président américain semble à nouveau enthousiaste. La rencontre se déroulera bien le 12 juin à Singapour.

La semaine d’intenses contacts qui a suivi la brusque annulation par Donald Trump a porté ses fruits. Un grand bal diplomatique s’est mis en place autour de cette rencontre. Les négociateurs ont travaillé d’arrache-pied pour remettre ce rendez-vous sur les rails. Trump ayant rappelé que tout cela faisait partie du jeu de « donnant-donnant », dans le cadre de négociations.

Cette annonce de Washington intervient après la visite d’une figure très importante du régime de Pyongyang, le général Kim Yong-chol, qui a entamé la semaine passée une visite exceptionnelle aux États-Unis, pour une série d’entretiens avec le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo. Symboliquement sa visite aux États-Unis montre déjà une certaine détente entre les deux pays. C’est le plus haut responsable nord-coréen à fouler le sol américain depuis dix-huit ans. Une visite qui laisse penser que le dialogue entre Washington et Pyongyang est bien relancé.

Mais que peut-on véritablement attendre d’un tel sommet ? Washington réclame une dénucléarisation complète de la Corée du Nord. Trump n’entend faire de réelles concessions, notamment sur la levée des sanctions imposées à Pyongyang, que lorsque la Corée du Nord se sera “débarrassée” de ses bombes atomiques.

De leur côté, les Nord-Coréens voient leur arsenal comme l’assurance-vie de leur régime. Ils ne sont, cependant, pas contre une dénucléarisation de la péninsule, mais à leurs conditions. Kim Jong Un souhaite qu’elle soit assortie de solides garanties de sécurité et qu’elle se fasse de manière progressive, étape par étape.

Vont-ils réussir à concilier ces positions divergentes ? Rien n’est moins sûr, c’est un défi très compliqué, mais le face-à-face Trump/Kim devrait être historique. Sauf revirement de dernière minute, Donald Trump sera le premier président américain à s’entretenir avec un dirigeant nord-coréen, depuis soixante-dix ans.

Cette réunion pourrait donner lieu à une conséquence collatérale de taille. Le sommet entre les deux dirigeants pourrait, en effet, se traduire par une déclaration officielle de la fin du conflit avec la Corée du Sud. Des rumeurs laissent à penser que le président sud-coréen, pourrait s’inviter au sommet pour une signature officielle.

 

SORTIE DE L’ACCORD NUCLÉAIRE AVEC L’IRAN
Trump a décidé de sortir de l’accord nucléaire iranien, un accord signé par Barak Obama. L’Iran est, depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, dans le collimateur du président américain et cette décision n’est donc pas une surprise. Trump a annoncé qu’il réinstaurait immédiatement les sanctions qui avaient été levées en 2015.

La décision du président américain de sortir de cet accord marque un revers cuisant pour les Européens. La France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ayant déployé d’intenses efforts diplomatiques pour convaincre Trump de ne pas jeter ce texte aux orties.

Le rétablissement des sanctions met tous les pays et toutes les entreprises qui avaient recommencé à commercer avec l’Iran dans une situation délicate : s’ils ne cessent pas toute relation avec l’Iran, ils pourront être sanctionnés par les États-Unis.

Comme avec la Russie, la Corée du Nord ou encore Cuba, lorsque l’administration américaine décrète des sanctions, elle applique le principe (très contesté) d’extraterritorialité de sa justice, c’est-à-dire qu’elle se donne le droit de poursuivre les entreprises étrangères pour des faits commis en dehors du territoire américain. Une entreprise commerçant en dollars avec un pays sous embargo devient donc de fait hors-la-loi.

Sachant que la moitié des échanges mondiaux se font en dollar, le pouvoir de nuisance d’une telle mesure est redoutable. Rappelons-nous de la banque BNP qui avait été condamnée par les États-Unis à une amende record de 9 milliards de dollars, pour avoir continué à mener des opérations avec l’Iran, Cuba et le Soudan en dollars.

L’objectif de Trump est clair : isoler l’Iran en empêchant les entreprises d’y faire des affaires. Et pas uniquement les entreprises américaines. La France, qui avait multiplié par trois son excédent commercial avec l’Iran, est largement impactée.

Les Européens ont annoncé qu’ils continueraient à respecter l’accord nucléaire mais, sans les États-Unis, l’accord est vide de sens et aura du mal à tenir. Certaines entreprises commencent d’ailleurs déjà à prendre leurs distances avec l’Iran, de peur des sanctions américaines. Exemple frappant, Total : le groupe avait commencé un retour en Iran en grandes pompes. Total vient d’annoncer qu’il allait se retirer du pays s’il n’avait pas la garantie d’être protégé contre les sanctions américaines.

Les entreprises vont devoir faire un arbitrage entre leurs intérêts économiques en Iran et leurs éventuels intérêts économiques aux Etats-Unis. En général, le choix est vite fait.

 

EUR-USD : HAUSSE DU DOLLAR ET TAUX
Le mois de mai a été mouvementé pour la paire euro-dollar. Le retour de l’aversion pour le risque, provoqué par la crise politique de l’Italie, a notamment redynamisé le dollar qui a retrouvé sa fonction de valeur refuge, lui permettant d’enregistrer une appréciation sur l’ensemble du mois.

Le dollar (sous les 1,17 $) a également été porté par le regain de tension sur les taux d’intérêts. Le Taux US à 10 ans ayant momentanément bondi au-dessus des 3%.  Ce coup de chaleur sur les taux d’intérêts, en partie lié à la flambée des cours du pétrole, qui entretient les anticipations d’inflation, a largement profité à la devise américaine.

Cette hausse des taux n’est pas une surprise. Elle était largement anticipée par les prévisionnistes. La question est de savoir évidemment où elle s’arrêtera.  Pour le moment elle s’est s’essoufflée (2,88%), mais les marchés commencent à s’acclimater à un taux US à 10 ans à 3%. Les marchés évoluent depuis une décennie dans un cycle de baisse des taux d’intérêt dans le monde. Toutefois ils sont conscients que ce cycle a pris fin.

Pour l’instant pas de panique. Si la hausse des taux se fait progressivement et de façon contrôlée, comme c’est le cas actuellement, ses conséquences seront gérables. Si par contre l’accélération se fait plus brutale, ce sera plus compliqué.

Les résultats de l’emploi US supérieurs aux prévisions, ont également renforcé le billet vert, rapprochant d’avantage la Fed d’une nouvelle hausse des taux dans les prochaines semaines.

L’euro de son côté a cédé du terrain, balloté entre la crise italienne et un ralentissement de la croissance en zone euro (croissance de 0.4% au premier trimestre contre 0.7% au trimestre précédent). L’euro vient de connaître sa plus forte baisse mensuelle depuis 2015. L’incertitude autour du nouveau gouvernement italien n’aide pas une zone euro qui souffre déjà d’un début d’année un peu laborieux.

 

PÉTROLE : VERS LA FIN DES QUOTAS ?
Après une remontée spectaculaire des cours du brut jusqu’à 80 dollars, stimulés par le retrait des États-Unis de l’accord avec l’Iran (6ème producteur mondial), les prix se sont repliés à la suite de rumeurs laissant entendre une prochaine augmentation de la production. La Russie et l’Arabie Saoudite semblent, en effet, favorables à une augmentation des quotas et pourraient bien décider, dès leur prochaine réunion de juin, d’ajouter plus de production sur le marché.

Rappelons que c’est la mise en place de ces quotas qui a permis de réduire l’abondance de l’offre et au pétrole de rebondir spectaculairement.

Ce revirement potentiel de stratégie pourrait, notamment, permettre de compenser la baisse des exportations iraniennes et vénézuéliennes, deux producteurs de l’Opep qui font actuellement face à de nouvelles sanctions américaines.

L’Arabie Saoudite et la Russie deux des trois plus importants producteurs mondiaux, ont cherché à atténuer les craintes des marchés concernant un manque d’offre.

Mais ce relâchement éventuel de la discipline de l’offre de l’Opep, qui avait été le principal vecteur de la reprise des cours du brut depuis la fin de l’année 2016, constitue tout de même un motif d’inquiétude pour les investisseurs.

Par ailleurs les pays producteurs n’ont pas intérêt à une hausse des prix sans fin, 60/70 dollars semble être un bon compromis. Une hausse trop forte du cours du pétrole pourrait avoir un impact négatif sur la consommation, éventuellement même ralentir la croissance dans certains pays, ce qui serait contreproductif pour les prix.

Ce revirement de tendance montre l’imprévisibilité d’un marché soumis à la nervosité des opérateurs. Une forte volatilité sur les cours du pétrole est donc encore à prévoir. Ce regain de nervosité n’est cependant pas surprenant au vu de la forte hausse de ces derniers mois, en douze mois, le prix du baril a doublé. La perspective de la réunion de l’OPEP du 22 juin ajoute un cran de plus à cette nervosité.

 

OR : ÉCHEC DE CONSOLIDATION AUTOUR DES 1300$
Le mois de mai n’aura pas été un bon mois pour l’or, sous la pression conjuguée de la hausse du dollar et de la hausse du taux à 10 ans américain.

Aux États-Unis, le taux à 10 ans qui oscille autour des 2,88% n’est, en effet, pas de bon augure pour l’or qui par définition ne procure aucun rendement.

Autre élément jouant contre le métal jaune : l’appréciation du dollar qui est la principale devise de négoce de l’or et qui rend les achats plus chers pour les investisseurs munis d’autres devises.

La perception du risque politique a néanmoins permis un léger regain d’intérêt vers le métal fin. L’annulation mi-mai du sommet entre Trump et le leader nord-coréen Kim Jong-un, avait entraîné un retour de l’aversion au risque qui avait bénéficié au métal jaune. Mais depuis Trump a remis d’actualité ce sommet.

La crise italienne avait réussi un temps à maintenir l’or au-dessus du seuil symbolique des 1300 dollars, mais le pays est désormais doté d’un gouvernement, le risque à court terme s’est donc estompé. La tentative de consolidation au-dessus de 1 300 $ a donc échoué.

CONCLUSION
Si jusque-ici les marchés avaient fait preuve d’une relative complaisance face au risque politique, l’actualité particulièrement chargée, en mai, a incité les investisseurs à se montrer plus prudents. Les actions ont donc alterné entre hausse et baisse. Si Wall-Street a repris le chemin de la hausse, l’Europe a plutôt consolidé, en raison du flou politique en zone euro.

L’Italie est sortie de l’impasse politique, ce qui a permis à l’humeur générale de redevenir positive. Les places européennes qui avaient été malmenées par la crise en Italie, ont salué la formation d’un nouveau gouvernement moins eurosceptique que la précédente proposition.

Le plus dur de la crise italienne semble passé et la perspective de nouvelles élections semble donc s’éloigner. Le scénario n’est pas idéal, mais au moins il y a un gouvernement et le spectre de la sortie de l’euro n’est plus à l’ordre du jour. L’Italie étant néanmoins un maillon faible de l’Europe, elle n’a pas fini de faire parler d’elle. Mais la crise aigüe est passée.

En Espagne, la crainte n’était pas la même. Même si on assiste à un changement brusque de gouvernement, il y a en Espagne un large consensus pro-européen, peu de choses seront remises en question. En outre économiquement, l’Espagne ayant fait ses reformes, elle est moins fragile que l’Italie. Le risque de contagion parait donc limité.

Par ailleurs, contrairement à la grande crise de la zone euro en 2011, la Banque Centrale Européenne a aujourd’hui toutes les armes pour calmer les marchés de taux d’intérêt.

Aux États-Unis l’enthousiasme sur l’impact positif de la réforme fiscale s’est estompé, alors que les craintes sur les conséquences d’une « guerre commerciale » se font plus vives.

Même si Wall-Street surperforme, les frictions entre Washington et ses partenaires commerciaux créent de l’incertitude qui a tendance à brider les velléités d’achats des investisseurs. Heureusement l’actualité politique et les publications macroéconomiques ont réussi à occulter en partie ces tensions commerciales.

La réaction des marchés est, finalement, restée assez mesurée, Trump fait face à un problème de crédibilité dans le mesure où il change sans cesse de position et les investisseurs voient dans ses dernières décisions essentiellement une tactique de négociation : menacer du pire pour obtenir des concessions. Méthode peu orthodoxe, dont les investisseurs commencent à s’habituer, ce qui leur permet de relativiser la situation actuelle.

Globalement l’image qui se dégage du marché reste positive. Même s’il y a une pression à court terme, il y a encore de la croissance. Certes c’est moins linéaire, il y a plus de turbulences, mais les fondamentaux restent relativement sains.

Le yo-yo boursier du mois de mai nous rappelle néanmoins que la volatilité est encore à prévoir, mais les événements actuels ne sont pas suffisants pour mettre en péril la reprise économique. Les nouvelles macro sont un peu moins enthousiasmantes qu’il y a six mois, mais les indicateurs restent bons et nous sommes encore en phase d’expansion : 2,5 % de croissance en Europe et pas d’indication de crise imminente aux États-Unis.

La Fed, de son côté, arrive à une normalisation en ayant bien communiqué. Pour l’instant tout se passe bien. Une trop forte hausse de dollar pourrait pénaliser les entreprises américaines et entamer le cycle vertueux, mais il faudrait une grosse fragilité européenne, or les frayeurs de la zone euro se sont estompées.

Précision : Les informations contenues dans cet article n’engagent que le rédacteur et ne sauraient se substituer à un conseil financier spécifique. Elles ne sont valables qu’à la date de leur rédaction uniquement.

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