profits record

Confronté à la hausse des taux d’intérêt et à l’endettement croissant des ménages, le gouvernement israélien étudie la possibilité d’imposer une taxe exceptionnelle sur les profits records des banques. Inspirée par le conseiller économique Avi Simhon et soutenue par Benjamin Netanyahou, cette mesure viserait à soulager les emprunteurs immobiliers. Mais elle rencontre de fortes résistances au sein du ministère des Finances et du secteur bancaire, inquiets de ses conséquences économiques et juridiques.

Un contexte économique tendu

Depuis deux ans, la Banque d’Israël poursuit une politique monétaire restrictive pour contenir une inflation persistante. Cette stratégie a permis de stabiliser les prix mais a aussi renchéri le coût du crédit, entraînant une forte augmentation des mensualités pour les ménages détenteurs de prêts hypothécaires.

Des milliers d’Israéliens, notamment parmi les jeunes familles de la classe moyenne, peinent aujourd’hui à rembourser leurs emprunts.

Dans ce contexte, les banques commerciales ont affiché des bénéfices sans précédent. Grâce à la hausse des taux, leurs revenus d’intérêts ont explosé, portant leurs profits cumulés à plus de vingt milliards de shekels en 2024.

Ce contraste entre la prospérité du secteur financier et la détresse d’une partie de la population alimente un vif débat sur la répartition des richesses et le rôle social des institutions bancaires.

Une taxe pour soutenir les emprunteurs

Face à cette situation, Avi Simhon, conseiller économique du Premier ministre, a proposé la création d’une taxe annuelle d’environ trois milliards de shekels sur les bénéfices bancaires.

Le produit de cet impôt serait destiné à financer des aides ciblées aux emprunteurs, sous forme de subventions temporaires ou de réduction des taux d’intérêt sur les crédits à l’habitat. Benjamin Netanyahou aurait accueilli favorablement cette idée, qu’il perçoit comme un moyen de répondre à la grogne populaire sans creuser le déficit public.

Cette approche, présentée comme un mécanisme de justice redistributive, vise à faire contribuer davantage les établissements financiers à l’effort national.

Elle s’inscrirait dans une tendance observée dans plusieurs pays développés, où les gouvernements cherchent à encadrer les profits des banques dans les périodes de tension économique.

Des réserves au ministère des Finances

Le ministère des Finances, dirigé par Bezalel Smotrich, exprime toutefois de vives réserves. Ses responsables estiment qu’une telle mesure serait difficile à justifier sur le plan juridique et risquerait de porter atteinte à la stabilité du marché.

Une imposition spécifique sur un seul secteur pourrait créer un précédent et compromettre la confiance des investisseurs étrangers.

Les juristes du Trésor soulignent également que la mise en œuvre d’une taxe exceptionnelle nécessiterait un processus législatif complexe et pourrait être contestée devant la Cour suprême.

Les économistes du ministère redoutent en outre que les banques répercutent cette charge sur leurs clients, par une hausse des frais ou une réduction des offres de crédit, ce qui annulerait en partie les effets escomptés de la réforme.

Une question politique autant qu’économique

La proposition d’Avi Simhon ne se limite pas à un débat technique : elle illustre une tension croissante entre le gouvernement et le système financier.

Pour les partisans de la taxe, il s’agit d’un geste de justice sociale indispensable dans une période où les inégalités se creusent. Pour ses détracteurs, c’est une dérive populiste qui risque de fragiliser la confiance dans l’économie israélienne.

Plusieurs observateurs notent que des initiatives similaires ont vu le jour en Europe, notamment en Italie et au Royaume-Uni, mais que leurs effets ont souvent été limités.

Les marchés ont réagi négativement à ces taxes temporaires, les percevant comme des mesures politiques plus que comme de véritables outils économiques.

Vers un compromis ?

Aucune décision n’a encore été arrêtée, mais le sujet figure désormais à l’ordre du jour du conseil économique du gouvernement. Selon certaines sources, un compromis pourrait consister à encourager les banques à réduire volontairement leurs marges sur les prêts immobiliers, sous peine d’une taxation imposée par la loi.

Cette option permettrait à Benjamin Netanyahou de préserver son image de défenseur de la classe moyenne tout en évitant une confrontation directe avec le ministère des Finances et le secteur bancaire.

Quelle que soit l’issue du débat, la question révèle l’ampleur du défi auquel Israël est confronté : concilier équité sociale, discipline budgétaire et stabilité du système financier.

Write a comment